Organiser un exercice de gestion de crise cyber est une démarche essentielle pour renforcer la résilience des organisations face aux menaces numériques croissantes. Ces exercices permettent d’anticiper les incidents, de tester les dispositifs en place et d’améliorer la coordination entre les différentes équipes impliquées.
Un exercice de gestion de crise cyber vise à simuler des situations d’urgence, telles qu’une attaque par rançongiciel, une fuite de données sensibles ou une attaque par déni de service. L’objectif est de reproduire des conditions réalistes afin d’observer les réactions des équipes, d’identifier les points faibles des procédures existantes et de proposer des améliorations.
La première étape pour organiser un exercice efficace consiste à définir des objectifs clairs. Il peut s’agir de tester la réactivité des équipes techniques, d’évaluer la communication de crise interne et externe, ou encore de mesurer la capacité de prise de décision en situation de stress. Une fois les objectifs définis, il est essentiel de constituer un groupe projet chargé de la planification de l’exercice.
Le scénario de l’exercice est un élément clé. Il doit être crédible, adapté au contexte de l’organisation et suffisamment détaillé pour couvrir différents aspects de la gestion de crise. Par exemple, le scénario RANSOM20, utilisé dans le guide de l’ANSSI, met en scène une attaque par rançongiciel avec exfiltration de données, impliquant des décisions critiques à plusieurs niveaux de l’organisation.
La préparation de l’exercice comprend la rédaction d’un chronogramme précis, la définition des rôles des participants et la mise en place des moyens logistiques nécessaires.
Les rôles clés dans un exercice de gestion de crise cyber sont :
Les joueurs : ils incarnent les acteurs de la gestion de crise (direction, équipes techniques, communication, etc.) et prennent des décisions en réponse aux situations simulées.
Les animateurs : ils orchestrent l’exercice, envoient les stimuli, simulent des interlocuteurs externes (autorités, médias, clients, etc.) et adaptent le scénario en fonction des réactions des joueurs.
Les observateurs : ils évaluent la performance des joueurs sans intervenir, notant les points forts et les axes d’amélioration pour le retour d’expérience (RETEX).
Le chronogramme, tel que présenté dans la fiche de l’ANSSI, structure l’exercice en séquences temporelles précises. Chaque stimulus est conçu pour déclencher des réactions spécifiques des participants.
Les types de stimuli utilisés lors d’un exercice peuvent inclure :
Emails : pour transmettre des informations techniques, des alertes internes ou des communications officielles.
Appels téléphoniques : pour simuler des échanges urgents avec des partenaires, des autorités ou des journalistes.
Messages sur les réseaux sociaux : pour créer une pression médiatique simulée, testant la réactivité des équipes de communication.
Documents joints (captures d’écran, rapports simulés, etc.) : pour fournir des indices ou des preuves fictives d’une attaque.
Interventions en personne ou par visioconférence : pour simuler des réunions de crise ou des conférences de presse.
L’objectif est de recréer une pression similaire à celle d’une crise réelle, en multipliant les sources d’information et en simulant des interactions variées (collaborateurs, médias, autorités, etc.).
Il est également important de briefer les participants pour qu’ils comprennent bien le cadre de l’exercice sans en connaître les détails spécifiques, afin de garantir des réactions authentiques. Le jour de l’exercice, il s’agit de suivre le déroulement prévu tout en restant flexible face aux réactions des participants. L’objectif n’est pas de les piéger, mais de les confronter à des situations complexes pour évaluer leur capacité d’adaptation.
Les animateurs jouent un rôle crucial en simulant les interactions avec des parties externes, comme des autorités de régulation ou des médias fictifs. Par exemple, des sollicitations de faux journalistes peuvent tester la capacité de l’équipe de communication à gérer la pression médiatique. De même, des appels simulés de partenaires ou de clients permettent d’observer comment l’information circule au sein des cellules de crise.
Après l’exercice, la phase de retour d’expérience (RETEX) est indispensable. Elle permet de recueillir les impressions des participants, d’analyser les forces et faiblesses du dispositif de gestion de crise, et de formuler des recommandations pour améliorer la résilience de l’organisation. Un RETEX à chaud, immédiatement après l’exercice, est complété par un RETEX à froid, réalisé quelques semaines plus tard pour une analyse approfondie.
Les exercices de gestion de crise cyber présentent plusieurs bénéfices. Ils sensibilisent les équipes aux risques cyber, renforcent la culture de la sécurité au sein de l’organisation et permettent de tester la robustesse des plans de continuité d’activité (PCA) et des plans de reprise d’activité (PRA). De plus, ils offrent l’opportunité de vérifier la conformité avec les exigences réglementaires, telles que le RGPD ou la directive NIS 2.
Pour maximiser l’efficacité des exercices, il est recommandé de les inscrire dans une stratégie globale de résilience. Cela implique de planifier des exercices réguliers, de varier les scénarios pour couvrir différents types de menaces, et d’impliquer progressivement un plus grand nombre de parties prenantes, y compris des partenaires externes. L’intégration de plusieurs sites, la simulation de crises multisectorielles, ou encore l’inclusion d’acteurs institutionnels peuvent enrichir l’expérience et rendre l’exercice plus représentatif des défis réels.
Un aspect souvent sous-estimé est la gestion de la communication de crise. L’exercice permet de tester non seulement la gestion technique de l’incident, mais aussi la capacité de l’organisation à contrôler l’information en interne et en externe. Des scénarios incluant des fuites d’informations sur les réseaux sociaux, des demandes de journalistes ou des réactions de clients insatisfaits permettent d’évaluer la pertinence des éléments de langage préparés et la réactivité des équipes de communication.
L’organisation d’exercices de gestion de crise cyber est un investissement stratégique. En développant des réflexes et des compétences spécifiques, les équipes sont mieux préparées à faire face à des situations réelles, minimisant ainsi l’impact potentiel des incidents de sécurité sur l’organisation. Dans un contexte où les cyberattaques sont de plus en plus sophistiquées, cette préparation est non seulement utile, mais indispensable.
Enfin, il est essentiel de considérer ces exercices comme un processus d’amélioration continue. Chaque exercice apporte son lot d’enseignements qui doivent être intégrés dans les plans d’action de l’organisation. L’analyse des écarts entre les réactions attendues et celles observées permet d’ajuster les procédures, de renforcer les formations et d’améliorer la coordination entre les différents acteurs de la gestion de crise.
Source & détails : ANSSI, organiser un exercice de gestion de crise cyber